lundi 9 janvier 2012

La France, peut-elle sortir l'Europe de la crise?

Ceci est la version française d'un post sur mon blog en anglais.

En tant que résident en France depuis 1982, je suis particulièrement enthousiaste à l'idée que c'est peut être la France qui pourrait nous conduire hors de la crise de la dette. Certains événements récents me donnent des raisons réelles d'être optimiste. Dans ce post, je vais parler de la possibilité d'utiliser la Caisse des Dépôts pour emprunter de l'argent à la BCE. Dans un second post, je vais commenter l'impact des propositions de Nicolas Sarkozy concernant l'introduction d'une taxe sur les transactions financières. 

Le premier événement majeur a été la publication dans Le Monde la semaine dernière d'une tribune de Michel Rocard et Pierre Larrouturou. Michel Rocard est un homme politique français très connu et très respecté  qui fut premier ministre sous-François Mitterand. Pierre Larrouturou est également un économiste très respecté - auteur de plusieurs livres, dont un très récent «Pour eviter le Krach Ultime" est fortement à recommander - voir ici. 

Rocard et Larrouturou mettent le doigt sur un fait vraiment incroyable qui a été ignoré par pratiquement tout le monde. Ils soulignent le scandale des taux d'intérêts demandés aux États,  des taux d'intérêt de 600 fois celles offertes aux banques commerciales
 
Ils ont également souligné un point j'avais également noté dans mon blog du 1er Janvier. Le point de vue -largement accepté-
que le traité de Lisbonne interdit à  Mario Draghi et de la Banque de prêter aux gouvernements,  n'est qu'une imposture. C'est un mensonge propagé sans relâche par les médias, les politiciens, et par le gouvernement allemand. 

En fait, le paragraphe 2 de l'article 123 de ce traité autorise expressément la BCE et les autres banques centrales à prêter à des «établissements publics de crédit». Et quand j'ai expressément demandé à la BCE, mercredi dernier, si un tel établissement de crédit pourrait prêter à des gouvernements, la réponse a été claire. Ils seraient traitées comme des banques, et en tant que tels, ils sont donc libres d'utiliser l'argent de la BCE comme ils l'entendent. 

Par conséquent, dans mon post de jeudi denier ("EUREKA") j'ai soutenu l'idée que, puisque la BCE a déjà prêté des quantités d'argent illimitées d'argent à toute banque qui le demande - 479 milliards d'euros au 21 Décembre - une autre journée «portes ouvertes» étant programmé pour le 29 Février, la solution se trouvait là. Les établissements publics de crédit comme, par exemple, la Caisse des Dépôts et Consignations en France peut parfaitement emprunter tout l'argent qu'ils veulent auprès de la BCE, aux mêmes conditions que celles offertes aux banques commerciales (1% sur 3 ans), le prêter ensuite directement à leur gouvernement, qui peut alors payer la totalité de sa dette auprès des banques. Les banques n'auraient plus l'emprise qui leur permet d'étrangler les états, et qui leur permet de dicter les politiques gouvernementales. La menace des agences de notation de dégrader le cote triple A accordé aux états, avec comme impact l'envolée des coûts d'emprunt n'existerait plus. C'est en effet en utilisant ce type de chantage que les banques ont réussi à extraire € 4300 milliards des poches des contribuables de la zone euro entre 1995 et 2010, un nombre qui constitue 3,73% du PIB de l'ensemble de ces 17 pays. Et avec l'augmentation des taux d'intérêt que les banques ont été en mesure d'imposer depuis le début de la soi-disant "crise Eurozone", les sommes siphonnée par les banques a été portée à € 391 milliards par an, soit 4,25% du PIB.


Comme je l'ai souligné, cela ne peut pas être justifié. Rappelez-vous que, la plupart du temps, les banques qui «prêtent» de l'argent aux gouvernements ne possède pas "réellement" l'argent qu'elle prêtent. Elles ont juste à le créer de toutes pièces par le «miracle» de la "fractional reserve banking". Et  lorsque elles ont besoin d'augmenter leurs finances un peu plus pour maintenir leurs réserves au niveau minimum imposé, il leur suffit se solliciter Mario Draghi pour qu'il leur donne tout ce qu'ils veulent à 0,5% ou 1% d'intérêt. Et ceci avec quasiment aucun risque. Depuis 15 ans, et alors que la probabilité de défaut souverain était effectivement nul, ils ont écrémé entre 250 et 320 milliards d'euros de l'économie de la zone euro chaque année. Maintenant, ils sont allés trop loin en réclamant des taux totalement obscènes - 18% dans le cas de la Grèce par exemple. Mais ils ont quasiment tué la poule  aux œufs d'or car l'arnaque est enfin découverte par des gens comme Rocard et Larrouturou (et plus modestement par moi dans une certaine mesure). Le Magicien d'Oz a fait tourné l'arnaque pendant des décennies, mais l'arnaque est enfin  dévoilée. Et les 99% n’accepteraient plus cette aberration.   

Alors voyons comment cela pourrait fonctionner en France. La France doit actuellement au système bancaire un total de 1591 milliards d'euros. Supposons que la Caisse des Dépôts et Consignations, établissement public créé en 1816, se présente à la BCE le 29 Février  pour déclarer qu'il souhaite emprunter 1591 milliards d'euros.  Comme l'offre de la BCE est illimitée, cela ne devrait pas poser un problème. Pour la  BCE il suffit de taper une rangée de chiffres dans un tableur, et bingo, l'argent est là. C'est ce que les banques centrales peuvent faire. 

Supposons maintenant que l'argent soit immédiatement transféré au gouvernement français au même taux d'intérêt (avec peut-être un petit peu en sus), et  que cet argent soit immédiatement utilisé pour rembourser tous les prêts en cours avec le système bancaire. L'avantage immédiat et évident: le gouvernement français n'aurait besoin de payer les intérêts qu'au taux de la BCE, c'est à dire environ 1%, au lieu des 3,41% actuellement imposés par les marchés. Cela permettrait d'économiser au contribuable français 70% du coût des intérêts qui vont actuellement directement aux banques - soit environ 38 milliards d'euros par an. Pourquoi passer par les banques quand vous pouvez obtenir la même somme pour beaucoup moins cher. Il suffit de shunter l’intermédiaire. Après tout, les banques ne font absolument rien pour justifier les revenus massifs qu'ils obtiennent.

Cette opération aurait un deuxième impact. Les banques qui avaient prêté au gouvernement français pourraient récupérer la totalité de leur argent, ce qui permettrait de stabiliser le système bancaire en réduisant l'exposition des banques à la dette souveraine. Notez au passage que, si vous pouvez penser que remettre1591 milliards aux banques serait  leur donner beaucoup d'argent pour jouer à nouveau, la plus grande partie de cet argent est purement fictive, destinée à  disparaître au moment où les dettes sont remboursées. En d'autres termes, l'opération aurait effectivement peu d'impact inflationniste - l'une des préoccupations du gouvernement allemand. En fait, utilser l'argent de la BCE pour rembourser la dette des gouvernements est infiniment mieux pour la stabilité de la monnaie que de simplement donner de l'argent aux banques, comme Mario Draghi et Mervyn King sont si heureux de faire. 

Je ne vois absolument aucune raison pour ne pas utiliser cette possibilité. Si le gouvernement français ne le fait pas, c'est qu'il n'agit pas  dans l'intérêt des contribuables français.

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